Dans l’art d’explorer des lieux abandonnés, nous comptons essentiellement sur la crise financière pour nous offrir tant d’endroits désaffectés. Tels des huissiers, nous écumons les faillites, les fermetures administratives, les châteaux trop chers à entretenir… Un goût malsain d’honorer cette célèbre citation “le malheur des uns fait le bonheur des autres”. Nous l’attendions depuis quelques temps, il arrive enfin, le facteur naturel va, lui aussi, nous offrir beaucoup de choses dans le futur. Nous vous présentons le cadavre d’une de ses premières victimes médiatiques, la résidence le Signal, abattue froidement par l’Océan Atlantique.


En 1965, l’immeuble Le Signal sort du sable et défigure alors l’horizon maritime de Soulac-sur-Mer en imposant son bloc de béton sans âme et sans beauté. A l’époque, snob et prétentieux, il fixait l’horizon et se montrait en maître face à cet océan encore timide et assez loin. L’érosion faisant son effet au fil du temps, la résidence est devenue la proie fragile de cette eau salée sans pitié.


Notre appétit photographique aurait pu être encore plus bourratif si à l’époque, en 1968, le promoteur immobilier n’avait pas fait faillite. En effet, dans le projet initial, le Signal n’était qu’un immeuble parmi tant d’autres. A la base, le projet comportait sept immeubles avant la liquidation judiciaire. A l’heure actuelle, la plupart des parcelles, qui devaient accueillir les autres bâtiments, sont déjà sous l’océan.


Matin de février 2015, le ciel est gris, il pleut, les rues sont vides, nous sommes à Soulac-Sur-Mer, un jour hors saison où les restaurants et commerces dorment en attendant l’afflux des touristes. Pourtant des touristes aujourd’hui il y en avait deux, nous, à la recherche de la nouvelle icone de la violence climatique, Le Signal.


On le voit, au loin, agonisant, nous avançons vers lui, trépieds à la main, non pour lui ériger une digue de secours avec du sable mais bien pour le prendre en photo. Un hommage impudique d’un bâtiment à nu, violé par ce vent glacial traversant ses fenêtres ouvertes, brisées, vandalisées.


Il y a encore quelques mois, les habitants apprenaient par lettre recommandée la mise en péril de leur résidence avec cet ultimatum : partir au plus vite sans quoi ils ne pourraient plus récupérer leurs affaires. Et des affaires, nous en trouvons beaucoup dans ce vestige post tempêtes.


Nous entrons dans la première entrée où nous trouvons toute une rangée de boites aux lettres, certaines sont encore pleines. Marie en ouvre une et découvre plusieurs prospectus dont un qui a attiré toute son attention, une super promotion d’Auchan qui offre un paquet de biscuit Granola pour deux achetés, une promotion qui porte autant sur la gamme chocolat au lait qu’au chocolat noir. Clairement une offre à prix coûtant, mais nous déchantons en voyant que l’offre est périmée de plusieurs mois, déception.


Des appartements sont ouverts aux quatre vents, d’autres résistent encore et restent bien fermés. Que se cache-t-il derrière ces portes fermées ? Des meubles ? Des photos personnelles ? Xavier de Ligonnes ? Des interrogations qui resteront encrées pendant un long moment. Pour les appartements accessibles, il reste pas mal d’effets personnels, des canapés, des cadres, la vaisselle encore sale dans l’évier. Il est certain que, dans cette précipitation de départ, des personnes ont eu comme unique choix d’abandonner leurs affaires car elles n’avaient pas de solution de stockage. Comme un bateau qui coule, elles n’ont eu le temps que de prendre le minimum et le plus important.


Certains propriétaires sont partis en laissant plusieurs inscriptions aux fenêtres en inscrivant la honte de les avoir abandonnés, des messages critiquant le maire de la commune et d’autres écriteaux pleins d’amertume. Par contre, aucun message trouvé insultant l’océan, clairement un deux poids deux mesures.


Nous parcourons la totalité de la résidence sous les claquements des portes. Régulièrement nous observons, à travers les fenêtres, l’océan pour voir si nous allons nous écrouler avec le Signal mais la marée est basse, il n’y a pas de risque de mourir ici, nous pouvons continuer gaiement à parcourir la résidence tels des charognards, appareils photo à la main.


A l’heure actuelle, nous sommes le 30 Mars 2015 et quelques expropriés du Signal sont en grève de la faim devant la résidence depuis plusieurs jours. Ils protestent contre la faible indemnisation qui leur est proposée. Une grève de la faim déterminée et courageuse qui aurait pu être arrêtée si l’offre d’Auchan sur le paquet de biscuit Granola offert était toujours d’actualité.


Signal, sans rancune, tu ne pouvais pas ignorer plus longtemps ton cancer écologique, tout le monde te disait condamné, tu n’as rien voulu savoir, te voila au porte de la morgue. Adieu.


Nous ne communiquons pas l’adresse de ce lieu pour des raisons évidentes de sécurité et n’encourageons pas à l’explorer par vos propres moyens. De nombreux cas d’accidents graves et mortels sont à déplorer dans les lieux abandonnés, merci de consulter cette page d’information : urbexsession.com/lieux-desaffectes-danger. Abstenez vous de nous demander l’adresse par message privé ou dans les commentaires, il n’y aura aucune réponse de notre part. Lors de cette exploration, aucune dégradation ni infraction a été commise pour pénétrer dans ce lieu. Nous n’avons aucune information sur les éventuels propriétaires. Si vous êtes propriétaire de cet endroit et que cette publication vous gêne, nous procéderons à sa suppression sur simple demande via notre page contact. Si vous avez en votre possession l’adresse de ce lieu et que vous souhaitez l’explorer, merci de ne rien dégrader ni vandaliser. Si les accès sont fermés, ne cassez rien pour rentrer, l’urbex est avant tout le respect des lieux, merci de faire vivre ce principe de base. Pour en savoir plus sur les règles de l’urbex, veuillez cliquer sur ce lien : urbexsession.com/les-regles-lurbex.


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Ah ! C’était le bon temps !

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